Interview : Odile Lavie, interprète Roxane

Rencontre avec...

Odile Lavie, Roxane

Odile Lavie est Roxane dans le Cyrano de Bergerac mis en scène par Gaëtan Petot*. Elle nous décrit une jeune femme drôle et aventureuse, et surtout un rôle superbe et formidablement écrit par Edmond Rostand.

Comment es-tu devenue comédienne ?

J’ai « fait du théâtre » pour la première fois à l’école primaire : j’ai adoré ça, j’ai trouvé l’expérience fascinante. J’ai encore joué un peu au collège et au lycée, mais avec une mère professeur et un père plombier, être comédienne me semblait un rêve inaccessible. Le déclic s’est fait lors d’une réunion parent-professeur, au lycée. Je pensais être institutrice plus tard, mais j’ai dit à ma prof d’espagnol que mon rêve, c’était le théâtre. Elle m’a répondu : « c’est possible ». J’ai osé me lancer, avec un véritable soutien de mes parents. J’ai fait une formation privée, en parallèle de la fac Arts du spectacle. A 22 ans, je suis « montée à Paris »... J’ai travaillé avec différentes compagnies, fait des stages...

J’ai toujours continué à me former, pour explorer de nouvelles méthode, comprendre, tester pour être en confiance. J’ai fait en particulier l’école du jeu, basée sur le corps, l’expression corporelle, la danse. Le corps est indissociable du jeu, c’est l’instrument du comédien.  

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Comment choisis-tu tes projets ?

C’est vraiment lié à l’humain, aux rencontres. J’ai rencontré ma metteur en scène actuelle, par exemple, lors d’un stage d’acting. J’ai longtemps cru que « réseauter », c’était faire semblant. J’ai mis du temps à oser dire à un metteur en scène que j’aimerais travailler avec lui, par exemple. Mais entretenir son réseau, c’est juste aller voir des gens, et voir si on peut s’entendre !

Quelle a été ta réaction lorsque Gaëtan t’a proposé le rôle de Roxane ?

J’ai été surprise : je n’ai jamais penséjouer Roxane, je n’ai jamais eu de rôle de « jeune première ». J’ai été agréablement surprise, j’ai eu envie d’en savoir plus. Gaëtan m’avait juste vu jouer quelques années plus tôt...

Le processus a été classique : j’ai passé une audition, j’ai été retenue. J’ai apprécié que Gaëtan me contacte lorsque le projet était réel, concret. Nous avons trop souvent des promesses vagues, des « je te contacte » qui ne donnent jamais rien, dans le monde du spectacle !

Roxane est parfois décrite comme une jeune écervelée. Comment la perçois-tu ?

Ah non, ce n’est sûrement pas une écervelée. Le rôle n’a pas été écrit comme ça par Edmond Rostand. D’ailleurs quand j’ai relu Cyrano, après avoir été contactée par Gaëtan, j’ai compris qu’elle avait de l’humour, était drôle et taquine. Aujourd’hui, elle serait vue comme une victime du patriarcat, victime de ce qu’elle représente, du mensonge des deux hommes de sa vie...

Elle se fait berner par son propre regard sur les hommes et l’amour, se fait manipuler. Bien sûr, elle doit se marier. Mais elle a aussi cette audace et cette liberté de traverser l’Espagne. C’est une aventureuse.

Une pièce en alexandrins, c’est plus difficile à jouer ?

J’avais joué en alexandrins uniquement à l’école ! Mais la pièce d’Edmond Rostand n’est pas littéraire : c’est un texte agréable à jouer, très organique. Il a été senti, pensé et écrit pour les acteurs. J’ai énormément de plaisir à le jouer. Et le personnage de Roxane est si bien écrit...

Laurent, Matthias et Manu se connaissaient déjà, connaissaient Gaëtan : est-ce qu’il a été difficile de trouver ta place ?

Pas du tout ! Je connaissais déjà Matthias, avec qui j’avais travaillé sur un festival. Nous avons mis en scène des pièces ensemble, un lien s’était créé. Le même lien s’est formé tout naturellement avec les autres acteurs.

Et travailler avec Gaëtan est très agréable. Rien n’est figé : il nous laisse chercher, expérimenter, trouver. Il nous laisse une grande place et la mise en scène est un échange.

Aimes-tu faire de la mise en scène ?

C’est terriblement dur et épuisant. J’adore diriger des comédiens – je suis toujours là pour préparer des copains avant une audition par exemple – mais la mise en scène, c’est bien plus que ça. Il faut porter le projet, gérer l'équipe, être fédérateur. Il faut être le parent de chaque acteur, gérer les frustrations des uns et des autres. Il faut s’occuper de la production...

Mettre en scène un seul en scène, j’aimerais. Mais un projet comme Cyrano, pas pour l’instant en tout cas.

Donne-nous envie d’aller voir le Cyrano de Gaëtan ?

Si je n’étais pas sur scène, moi j’aurais envie d’y aller. Gaëtan a prévu une distribution complète, une véritable création musicale, le chœur... C’est vivant, et communique le désir très fort de Gaëtan de monter la pièce.

Cyrano de Bergerac est une pièce très intime pour les réalisateurs. Ils doivent s’entourer des bonnes personnes, faire ressentir leur envie, leur plaisir et leur amour du texte. Dans le projet de Gaëtan, l’alchimie fonctionne.

Tu es Roxane, tu débarques en 2025. Quelles sont tes envies, tes surprises ?

J’aime l’idée de pouvoir choisir l’homme avec lequel j’ai envie de vivre – ou pas. Je suis émerveillée par internet, par l’art et la culture accessibles à tou.te.s.

J’ai envie d’écrire, aussi. D’ailleurs, j’écris.